4.9.06

(F)rance


C’est donc ainsi que ce fini l’été sur une question d’identité. Une identité sociale plus que personnelle. Si de la dernière je ne m’en préoccupe plus depuis bien longtemps, la première me revient depuis quelques mois souvent à la gueule. Et cet été bien plus violemment que d’habitude.

Alors que pour le reste de l’humanité, je suis un type passionné et combatif qui multiplie les projets culturels et qui les mènera un jour à bout. Pour l’administration, je suis un chercheur d’emploi. Pour le gouvernement et les nantis un assisté, un poids mais surtout un simple chiffre qu’il faudrait faire disparaître. Pour les patrons, je suis au mieux une ressource humaine qui coûte beaucoup trop cher (le smic) au pire un type qui ne travaille pas, donc qui ne veut pas travailler, c’est-à-dire un chômeur. L’incroyable étant que cette minorité sociale (le gouvernement, les nantis et les patrons) a une force de persuasion certaines fois plus efficace que les encouragements de mon entourage. Mon identité sociale, c’est d’appartenir –malgré mes côtés individualistes- à la communauté de Château Rouge. Une identité sociale dont la notoriété est quasi-mondiale de Paris jusqu'à Montpellier, de Bamako à Point à Pitre. Pour beaucoup si je ne suis pas noir, le simple fait de vivre dans ce quartier fait de moi un africain. J’en tire une certaine fierté.

Cet été plus que les autres je me suis donc pris violemment cette identité en pleine face. Surtout à l’occasion des travaux d’aménagements décidés par la mairie de Paris, histoire de construire le Grand Paris. Figurez vous que les socialistes ont décidés de "civiliser" mon quartier. C’est en tout cas ce qu’ils ont permis d’inscrire sur les écriteaux. Charmant. Apparemment l’occupation du quartier par les forces de police et les CRS ne suffisant plus, la mairie a décidé de tout casser pour reconstruire un monde civilisé. Pourquoi tant de flics alors que la plupart n’ont rien d’autre à faire que draguer les filles ? Pourquoi faire passer l’idée aux habitants de ce quartier qu’ici ce n’est pas chez eux ? qu’ils ne sont pas "civilisés" ? Pourquoi si ce n’est finalement pour bien montrer que la France qu’elle soit socialiste ou de droite est un pays raciste. Un ancien pays colonisateur complice de génocides en Afrique et en Europe.

Comme je suis noir, je suis juif. Une identité sociale que je ressens sans pour autant l’être. Ces dernières années plus qu’avant...Cupidon? sans doute mais pas seulement... Cet été être juif n’était pas forcément chose facile. La lecture de "Souvenirs obscurs d’un Juif polonais en France" (Pierre Goldman j'y viendrai) dans le métro m’a bien fait comprendre qu’après les massacres de civils commis par Etat qui se dit Juif au Liban, les juifs ici sont mal vus. La belle affaire, l’excuse est trop belle pour nos habitudes antisémites. La France n’est pas la petite sœur de l’Eglise pour rien. Les Catholiques ont une longue tradition antisémite. Au Vatican les jeunesses hitlériennes ont leur représentant. A Paris, Bertrand Delanoë ne s’en formalise pas et vient de baptiser une place Jean Paul II. La séparation de l’Eglise et de l’Etat dans toute sa splendeur. Quant à moi je me lasse de vivre dans un pays qui s’affirme laïc mais dont les dirigeants stigmatisent les musulmans. Quant à moi je me lasse de vivre dans un pays qui s’affirme laïc mais dont la première dame de France célèbre la messe à l’Elysée.

Quant à moi je me lasse de ce pays qui dénonce régulièrement l’intolérance au moyen orient et aux Etats Unis mais qui n’a pas montré le meilleur des exemples ces dernières années. L’Histoire mal digérée, le chômage, le racisme, l’antisémitisme renforce le communautarisme qui renforce à son tour les préjugés. Je me sens donc las de toutes ces identités sociales que je dois assumer malgré moi. Au moment où l’utopie internationaliste ne se retrouve que dans les flux financiers, l’identité sociale avec l’ordre devient le principal thème de campagne électorale autant à droite qu’à gauche. On y parle aussi de "rupture" et de "révolution". Mais leur révolution autoritaire et identitaire ne sera jamais ma révolution. Ce soir, je me tire d’ici. Je ne me fais aucune illusion sur l’Angleterre, pays qui SI tout se passe bien sera mon pays d’adoption en 2007. "La France vous l’aimez, ou vous la quittez!" Nico…j’ai très envie de te prendre au mot.


Rendez vous vers le 11 septembre.

L'Identité - Les Têtes Raides & Bertrand Cantat.
Don't worry about the gouvernment - The Talking Heads
Paris, je ne t'aime plus - Léo Ferré
France - The Libertines