Le moins que l’on puisse dire, c’est que les années 80 ne m'ont jamais vraiment inspiré… Surtout les quatre premières années de marche funèbre, de danse macabre. Je ne vais pas vous blâmer d’avoir séché le début des eighties. Entre les prémices prometteurs du libéralisme sauvage, l’émergence du SIDA et le culte de la coupe permanentée, le seul réconfort fut MTV. Autant dire que vous n’avez rien loupé, depuis rien n'a changé. Certains situent la fin de l’innocence de la musique pop avec l’assassinat d’un black par des Hell’s Angels lors d’un concert des Rolling Stones en 69. Personnellement je la situe bien après, avec l’assassinat de John Lennon en 1980. Un acteur officialise la société du spectacle et dirige les Etats-Unis à coup de programme de cinéma. OMD sort Enola Gay et au même moment Ronald Reagan décide de produire 1200 bombes à neutrons. En Angleterre après plus de deux ans de libéralisme, c’est à Brixton que ça explose en avril 1981, durant trois jours, les émeutes succèdent aux émeutes. Les flics blancs tuent des noirs, les noirs veulent tuer les blancs et Soft Cell reprend Gloria Jones. À Central Park ce ne sont pas loin de 500000 personnes qui se réunissent devant les Stones et Michael Jackson bombarde le Hit-Parade avec son Thriller. En France, on passe de la joie ( la gauche au pouvoir ) aux larmes ( montée du chômage et du Front National ) et la musique rime avec publicité. Les artistes se changent en businessmen, Elvis est bien mort, c’est la victoire du Colonel Parker. Elisabeth Taylor résume ça brillamment « je suis ma propre marchandise ». Quel aveu ! Le compact disque et le walkman font leur apparition. L’individualisme est à la mode. Mort de Philip K. Dick en 1982, je suis vivant et il est mort, à moins que cela soit le contraire et c’est bien triste. Paul Weller quitte les Jam pour former The Style Concil avec Mick Talbot des Dexys Midnight Runners . C’était vraiment nécessaire ? Sales années en tout cas, même pas eu le courage de suivre Malcom McLaren qui mettra son nez de filou dans l’underground de la musique noire aux Etats-Unis. Je découvrirai plus tard la culture hip-hop, ce n’est pas bien grave. L’esprit contestataire noir américain est brutalement neutralisé avec l’arrestation de Mumia Abu-Jamal. Non vous n’avez rien loupé, même pas les soirées de l’Haçienda qui se sont vite révélées des fours monumentaux. Les clubs ferment et les soirées finissent dans les garages ou les pubs mais pas encore en pleine campagne. En 1983, on parle encore avec raison de New Order, de Depeche Mode, mais aujourd’hui on a oublié Visage et son Fade To Grey pour le ranger avec Yazoo. C’est bien dommage car durant ces quatre années sinistres, une lame de fond était en train de former le plus grand raz-de-marée musical depuis l’invention du rock. Moi je fais une pause, je rentre à la maison et m’endors dans les bras de ma baby-sitter qui s’éclate sur Nena et Cindy Lauper. Vivement 1984 !
A lire, a relire, se souvenir : Lipstick Traces de Greil Marcus qui consacre tout un chapitre sur ces années de plombs et sur Michael Jackson en particulier.
A lire, a relire, se souvenir : Lipstick Traces de Greil Marcus qui consacre tout un chapitre sur ces années de plombs et sur Michael Jackson en particulier.